Clémence Leleu - Publié le 22 septembre 2015
PROSPECTIVE - Minh Man Nguyen et Clément Duroselle, jeunes architectes français, créateurs de leur propre agence WAO, nous exposent leur vision de la vie et de la maison en 2050.
À deux pas du canal de l'Ourcq, en plein cœur du populaire 19ème arrondissement de Paris se cache WoMa. WoMa ? Pour Working/Making, une fabrique de quartier, équipée d'un atelier de fabrication numérique, avec fraiseuses, découpeuses laser et imprimantes 3D, ouvert à tous.
WoMa, impulsée par Minh Man Nguyen et Clément Duroselle, tous deux architectes, fédère aujourd'hui sept personnes aux compétences variées : artistes, designers, architectes... et une cinquantaine d'adhérents qui gravitent autour du projet.
Leur but : faire de ce lieu de fabrication et de coworking le fer de lance d'un nouvel esprit de création. Repenser la pratique architecturale en créant un réseau de savoir-faire par la mise en commun de compétences multiples.
Dans ce bouillonnement d'idées, les contours de la maison du futur ont rapidement pris forme.
Construire une maison à son image
La maison 2050 sera synonyme d'implication. Son propriétaire participera davantage à sa construction. “On peut imaginer que l'on téléchargera des plans sur internet, que l'on pourra ensuite imprimer en 3D dans de micros usines locales. Chacun fabriquera sa maison à son image” envisage Minh Man Nguyen.
Le mouvement maker ne cessera de se développer. Nous créerons de plus en plus nos propres objets nous-mêmes, mais attention, cela ne veut pas dire que les métiers manuels disparaîtront. Leurs compétences très techniques n'étant pas à la portée de tous. “Il y aura une démocratisation du savoir-faire, doublée de l'apport d'expérience de métiers plus techniques comme l'ébénisterie ou la menuiserie. C'est encore une fois une question de mutualisation des savoirs.” poursuit l'architecte.
La maison sera également appelée à se renouveler plus vite. Fini le temps où les maisons pouvaient rester des centaines d'années sans bouger d'un iota. “Elles changeront plus facilement d'aspect, de forme, se réinventeront en permanence. Un peu comme aujourd'hui où tous les 6 mois nous mettons à jour nos portables, il y a aura cette même démarche avec les habitations” estime Clément Duroselle.
Ecologie et upcycling
Que ferons nous alors des matériaux usagés si nous modifions sans cesse notre maison? “Idéalement, il faudrait tendre vers une évolution des techniques de réutilisation des matériaux, sur le modèle du mouvement de l'upcycling. Rendre le processus de réutilisation plus efficace.” explique Minh Man Nguyen.
Les matières aussi évolueront. Plus souples, elles permettront facilement d'imprimer ses propres murs ou son mobilier grâce aux imprimantes 3D. “On pourrait penser à la création d'un hybride entre le plastique et le béton afin de pouvoir le couler dans une imprimante 3D. Mais il existe déjà des choses intéressantes notamment à Bogota (Colombie) comme un béton liquide qui durcit en 30 minutes ”.
Le règne de la connectivité
En 2050, nous serons tous connectés et la domotique sera notre meilleure alliée. “Particulièrement en ce qui concerne les questions d'énergie” indique Clément Duroselle. Si la domotique a déjà investi les foyers, elle se démocratisera davantage, notamment grâce à la facilité de connectivité. Finies les zones où il est impossible de capter un quelconque réseau internet !
Ainsi, il ne sera plus forcément nécessaire d'habiter en ville pour pouvoir être au c?ur de l'action. La campagne retrouvera ses lettres de noblesse. “La ruralité va regagner du terrain. Il y aura un besoin d'espace et de retour à la terre. Les gens retourneront s'installer en dehors des villes” révèle Minh Man Nguyen. “Quand les acteurs de l'agriculture urbaine en auront marre des villes, ils partiront faire leurs plantations à la campagne” lance le jeune homme dans un sourire.
La maison de 2050 sera donc connectée, plutôt à la campagne, créée à l'image de son propriétaire. D'accord, mais avec qui y vit-on? On y vivra à plusieurs, les gens ayant davantage besoin de se rencontrer et d'échanger.
Pour Clément Duroselle, en 2050, la colocation serait encore plus démocratisée. “La maison deviendra un lieu d'interaction. Les gens auront besoin de vivre ensemble. Le concept de maison familiale s'amoindrit, la solution est peut-être la super coloc !'.