Adèle Ponticelli - Publié le 21 décembre 2015
DÉCHETS - Optimiser la collecte des déchets grâce à un réseau de pneumatiques souterrain, voilà le pari de plusieurs municipalités françaises.
Imaginez. Aux pieds des immeubles, plus de grosses poubelles vertes, jaunes ou bleues. Plus d'odeurs. Et, dans la rue, 75% de camions poubelles en moins. Ce n'est pas un futur utopique, mais une réalité qui se généralise doucement. Grâce à la collecte pneumatique des déchets.
Il y a quelques jours, le conseil de la communauté d'agglomération Est Ensemble a voté la création d'une vingtaine de nouvelles bornes de collecte de déchets, à Romainville (Seine-Saint-Denis). Elles viendront s'ajouter aux 123 existantes. Signe que la population a adhéré à cette forme particulière de ramassage des ordures.
Depuis octobre 2011, plus de 2600 logements, situés dans des quartiers d'habitat collectif de cette ville du Nord Est de la capitale, bénéficient de cette innovation. Romainville fait figure de pionnière en la matière, en tout cas dans l'hexagone.
Corinne Valls, maire de la ville depuis 1998, a découvert le dispositif à Barcelone et décidé de l'importer dans sa commune. Aujourd'hui, cette innovation, née dans les pays du Nord de l'Europe, est présente partout sur la planète. De Taipei à Copenhague, en passant par Séville ou encore Kuala Lumpur, plus de 750 installations existent dans le monde, d'après la société Envac, inventeur du système.
Le fonctionnement de la collecte
Concrètement, la collecte pneumatique des déchets fonctionne grâce à un réseau de tuyaux souterrains où circulent alternativement les ordures ménagères et les déchets triés. Un moteur produit un flux d'air, transformant, en quelque sorte, le réseau en un immense tuyau aspirateur. Un programme informatique optimise la circulation pour qu'il n'y ait ni choc, ni perte d'énergie.
Une fois déposés dans les bornes par les habitants, les déchets rejoignent à une vitesse de 70 km/h un terminal de collecte. Ils y sont compactés et stockés dans des conteneurs, qui seront acheminés dans des centres de traitement des déchets. Quant à l'air qui a servi à aspirer les déchets, il est “épuré” afin d'être rejeté dans l'atmosphère.
Eclairage avec la vidéo explicative réalisée pour le nouveau quartier Clichy-Batignoles à Paris, doté du système :
Le verre et les petits électro-ménager ne peuvent être mis dans les bornes car ils risqueraient d'endommager le réseaux.
Le contenu des bornes est vidé à heure fixe selon les habitudes des habitants. Si jamais les déchets atteignent un certain seuil avant l'heure de relève prévue, une collecte supplémentaire est activée.
Ville écologique et économique pour ses habitants
C'est tout un art que d'optimiser l'aspiration. Comme l'explique Bruno Martin, directeur commerciale d'Envac France, il faut s'adapter. "Une ville avec un bassin ouvrier n'aura pas les mêmes habitudes qu'un quartier comme La Défense, il faut donc pouvoir s'adapter aux heures de dépôt des ordures, à leur quantité, etc."
Car, ce qui coûte le plus d'énergie est le démarrage du moteur pour lancer une collecte. Lancer une collecte pour une seule borne est ainsi une dépense à éviter. "Le but est de consommer le moins d'énergie possible", avance Bruno Martin, chez qui on sent un véritable souci pour la planète, "d'ailleurs, chez Envac, nous incitons les municipalités à alimenter notre système avec des énergies vertes".
Outre changer ses habitudes et opter pour un sac poubelle plus petit (30 L maximum), la principale difficulté consiste à respecter le tri. Comme il n'y a pas de contrôle de poubelles, c'est tout un conteneur qui risque d'être refoulé et de partir aux ordures ménagères.
"Mais il n'y a rien d'insurmontable, continue Bruno Martin, il suffit juste d'un peu de pédagogie pour que le système fonctionne."
Et la collecte des déchets pneumatique peut avoir d'autres avantages. Elle permet la valorisation des quartiers populaires où les gardiens, dégagés de l'obligation d'entretien des poubelles et de leur local, peuvent retrouver un rôle plus social. Ce qui, de plus, peut entraîner dans certaines communes, une baisse des charges pour les habitants. C'est le cas à Romainville où elle représente une économie de près de 100 euros par an.
L'avenir ? On ne doute pas qu'il verra le système se développer dans de plus en plus de communes. Déjà Issy-les-Moulineaux, l'éco-quartier de Clichy-Batignolles dans le 17ème arrondissement de Paris, Vitry-sur-Seine ou encore Saint-Ouen l'ont adopté !