Marie Tétrel - Publié le 17 avril 2021
EXPÉRIENCE - Dans la grotte de Lombrives, la mission scientifique Deep Time va permettre de comprendre les liens entre notre cerveau et la perte de repères spatio-temporels.
Si nous avons tous dû surmonter le fait de vivre isolés les uns des autres pendant les différents confinements, certains se lancent dans une expérience encore plus extrême, mais choisie.
Depuis le 14 mars 2021, quinze hommes et femmes vivent au fond de la grotte de Lombrives, à 110 km de Toulouse, en isolement total. Sans montre ni accès à la lumière naturelle ou aux informations extérieures, la mission Deep Time va permettre de comprendre les liens entre nos cerveaux et le temps qui passe, ainsi que la synchronicité au sein d'un groupe dans un environnement inconnu.
Une expérience pour comprendre la notion du temps qui passe
"Voilà des années que je pensais à une mission en immersion dans une grotte, sans accès au temps et à la lumière. J'avais été fasciné par les récits de Michel Siffre, l'inventeur de la chronobiologie, par « Voyage au centre de la terre » de Jules Vernes et je sentais que mes études sur l'adaptation avaient quelque chose à y faire, d'autant plus qu'aucune étude, jusqu'ici, n'avait vraiment porté sur le cerveau humain". Christian Clot, explorateur à l'initiative du projet, a mis au point cette expédition hors du commun avec l'Human Adaptation Institute.
L'expérience se déroule donc à 400 mètres en dessous de la terre. 8 hommes et 7 femmes, bénévoles avec des profils différents (une infirmière, une bijoutière, un professeur de mathématiques...), vivent ensemble dans l'une des grottes les plus grandes d'Europe. 4 tonnes de matériel ont été acheminées afin de rendre l'endroit habitable. On y trouve des espaces pour dormir, manger et de quoi étudier le lieu, à savoir la faune et la flore présentes dans la grotte.
Chacun des participants relève ses constantes régulièrement, mesure son poids, note ses impressions. Une équipe de scientifiques, restée en surface, recueille les données. Pour documenter l'expérience, chaque semaine, Christian Clot raconte leur quotidien dans une série de podcasts.
Les premières conclusions de l'expérience
Sans lumière du jour ni montre, difficile de garder la notion du temps. Les journées se transforment en cycles, où deux périodes se succèdent : celle d'éveil et celle de sommeil. La durée de ces cycles varie selon les individus. Ainsi, "tout le monde s'est un peu désynchronisé", explique Christian Clot dans son podcast. "On est d'ailleurs tellement désynchronisés aujourd'hui, qu'il y a toujours au moins une personne réveillée dans la grotte".
Et si l'on apprend que l'ambiance reste bonne et que chacun continue ses activités, l'explorateur remarque que les conditions de vie sont plus difficiles que prévues. On relève une température de 10 degrés et un taux d'humidité à 100 %, vécus comme "une sorte d'agressions de la nature sur les corps".
L'expérience d'isolement prendra fin le 24 avril 2021, lorsque l'équipe remontera à la surface. La mission, elle, continuera, puisque les scientifiques continueront d'analyser les résultats transmis et la réadaptation des bénévoles à la vie réelle.
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