Emmanuel Chirache - Publié le 6 septembre 2021
LA BONNE COMBI NATION - T1, T2, T3... Les Français sont fans de ces petits vans Volkswagen rétro avec lesquels ils prennent le chemin des vacances. Mais pourquoi tant d'amour ?
"Il a transporté tous les idéaux de la terre. La porte devait être mal fermée". En 2008, pour les 60 ans du Combi Volkswagen, l'agence DDB avait réussi une campagne de pub reposant sur la longévité et la mythologie hippie du véhicule. 13 ans plus tard, le Combi n'a sans doute jamais été aussi à la mode sur la route des vacances. Que ce soit sur la nationale 13 pour aller en Normandie, le long d'une plage vendéenne ou dans un virage de départementale en Ardèche, nous sommes nombreux à avoir aperçu sa sympathique silhouette cet été.
Sur le marché de l'occasion, ces Combi dénommés T1, T2 ou T3 (T pour Transporter), les modèles anciens les plus célèbres, se monnaient d'ailleurs à un prix très élevé (jusqu'à 30 000 euros en état neuf) qui prouve à quel point la demande est forte. Sur Instagram aussi, on trouve de plus en plus de passionnés qui créent un compte dédié à leur voyage en minivan Volkswagen. La plupart du temps, le compte est même directement celui du van, qui est personnalisé par un patronyme. "C'est ça aussi, le Combi, nous expliquent Sarah et Pierre, actuellement en vadrouille dans leur T2 beige de 1973 surnommé Sacré Hubert, c'est vraiment une personnalité, chaque van est unique !".
Un véhicule chargé d'histoire qui se personnalise facilement
Souvent, le trajet qui permet au van d'arriver jusqu'à son propriétaire constitue déjà une petite histoire singulière, l'occasion de construire un récit personnel. La plupart des T1 ou T2 actuels proviennent de Californie (entre 1966 et 1970, 95% des exportations de Combi partaient pour l'Amérique du Nord !) et reviennent en Europe aujourd'hui via divers chemins.
"J'ai eu la chance de trouver mon van fin 2019 pour moins de 20 000 euros, aujourd'hui c'est très rare, nous raconte Greg, heureux propriétaire de Liberty, un beau T2 orangé de 1971 dont il narre les aventures sur Instagram. C'est parce que le propriétaire anglais voulait le vendre avant le Brexit, et je suis passé par un importateur en Bretagne. C'est compliqué, car il faut trouver quelqu'un de confiance dans ces cas-là !" Après un an de stationnement dans le garage de Greg dans les Yvelines pour cause de Covid, entre autres, Liberty a enfin pris les voiles pour voyager à travers la France en 2021.
Avant d'atterrir dans leur garage, Hubert aussi avait connu plusieurs vies : "Nous sommes les 10e proprio, explique Sarah, à l'origine dans les années 70, c'était un véhicule de la caravane du tour de France qui distribuait des goodies. L'ancien propriétaire le louait pour les mariages, mais son business est tombé à l'eau à cause du Covid. Et encore avant, il a appartenu à un médecin fan de surf, qui a customisé le rétro en forme de surf, a rabaissé la voiture, plaqué des autocollants de surfeurs à certains endroits..."
Un van ultra modulable, qu'il soit déjà Westfalia ou non
Sarah et Pierre ont trouvé Hubert sur Le Bon Coin pour un prix honnête, mais il faut dire qu'il n'était pas équipé par Westfalia, la gamme d'aménagement qui a fait le succès des Combi VW. "On l'a bidouillé très rapidement pour le road trip, on l'a acheté le 13 août et on est partis le 15 !" s'étonne encore Pierre. Sarah renchérit : "On veut l'aménager à notre goût. Ce voyage c'est l'occase de tester !" Et même en quelques jours, il est visiblement possible de se construire un petit espace de vie pour un couple et deux enfants, un garçon de 6 ans et une petite fille de 11 mois.
Sarah nous détaille ce premier aménagement rudimentaire, constitué de 4 cubes : un pour le nécessaire, avec une plaque à induction, de la vaisselle et des couverts, un cube en-dessous pour les provisions, un cube pour l'hygiène et le ménage, enfin le dernier cube, dédié à l'électricité et au confort. "Nous avons aussi ajouté un capteur d'humidité, car le van est très humide et notre garçon est asthmatique. Nous avons aussi un ventilateur qui se recharge en usb, et une malle pleine de jeux de mon grand père, une table et des chaises stockées sur le toit."
C'est ce côté modulable et personnalisable qui a motivé aussi Greg, passionné de Volkswagen depuis l'enfance et détenteur d'une Coccinelle ancienne. Quand il a récupéré le véhicule, celui-ci n'avait pas de moteur, alors il a tout simplement ajouté celui de sa "Cox". Rien ne se perd, tout se crée sur un Combi ! Depuis, il a aussi ajouté rideaux et housses de coussin faits maison, et bien entendu les incontournables autocollants sur les vitres.
Un coup de coeur esthétique pour des vacances slow
Mais ce qui fait avant tout le charme de ces Transporters, c'est bien sûr son esthétique rétro, symbole de liberté et de voyages. Pierre et Sarah, eux, étaient déjà mordus de voitures anciennes, ils attendaient depuis longtemps l'opportunité de sauter le pas. "Le look du combi, c'est un coup de coeur ! s'enthousiasme Sarah. On adore et ça rejoint cette passion des véhicules anciens et notre envie de road trip. Comment ne pas tomber amoureux ?"
Greg apporte de l'eau à notre moulin : "Il y a un gros capital sympathie du Combi Volkswagen ! ça se voit tout de suite quand vous roulez, les gens vous regardent avec bienveillance et curiosité. C'est même dangereux sur la route ! Souvent, les automobilistes sont tellement obnubilés par le combi qu'ils oublient de regarder devant eux et qu'ils pourraient provoquer des accidents, on est obligé de faire attention pour eux".
"Je dis souvent que c'est le véhicule du bonheur, abonde Sarah. Les gens sourient en nous voyant, ils font coucou, ils veulent prendre des photos. Beaucoup de personnes âgées se souviennent de leurs années hippie et ils sont surpris de voir des jeunes rouler dans cette voiture." Habitué à conduire des voitures anciennes, même Pierre a été surpris par l'amour qui entoure son T2 : "J'ai roulé en Ford Mustang, ça fait réagir les gens, mais là c'est totalement décuplé, je ne pensais pas que ce serait à ce point-là, ça va au-delà des passionnés de voitures."
Au final, tous ces atouts répondent au même désir : partir en voyage dans une maison qui nous ressemble, un véhicule qu'on peut aménager, décorer soi-même et qui nous promène le long de petites routes à une allure paisible. Prendre le temps de s'arrêter où l'on veut, déclencher des sourires et des rencontres sur son chemin. Et si finalement nos idéaux, sortis par la porte à la fin des années 70, avaient fini par revenir par la fenêtre ?