Lisa Hör - Publié le 5 juillet 2016
INNOVATION - Lilian Chardon n'a pas breveté cette invention surprenante, en accord avec partage de connaissances et l'innovation pour le plaisir, prônés par la culture maker.
Cette roue sans axe ne sera pas industrialisée. En tout cas, pas par son inventeur, Lilian Chardon, ingénieur de formation et directeur de bureau d'étude chez Somfy.
Il n'a pas déposé de brevet, et tient même les plans à disposition de ceux qui voudraient l'améliorer, dans la logique de l'open source. C'est sur son temps libre qu'il a mis au point cette roue vide qui tourne pourtant parfaitement.
Sa maison, Lîlegal, est autant un atelier qu'une galerie d'art. Lilian Chardon projette d'en faire un lieu où se retrouveront bidouilleurs ou autres inventeurs géniaux. Il partage la philosophie des makers, ces bricoleurs du futur, mais aussi leurs outils, puisqu'une partie de sa roue est imprimée en 3D.
Pour la faire avancer, on pousse un manche fixé sur la pièce qui coulisse le long du disque intérieur. Grâce à cette trouvaille, elle n'a plus besoin de l'axe qui passe au centre de toutes les roues classiques.
Les applications pratiques existent. Lilian Chardon l'a utilisée pour fabriquer une poussette pour enfant : "L'intérêt de la grande roue est qu'elle passe tous les obstacles, elle monte même les escaliers." Il réfléchit également à l'intégrer à une charrette robotisée, pour des vignerons.
Avant lui, un autre créateur avait déjà réinventé la roue. En 1989, Franco Sbarro, constructeur de voitures, présentait une "roue orbitale" elle aussi sans axe, même si ce n'est pas la même solution technique d'après Lilian Chardon (voir ce reportage vidéo sur Franco Sbarro, à 11 min 19). Celle-ci, destinée à de nouvelles de motos digne des films de science-fiction, ne s'est jamais imposée, malgré ses avantages mis en avant.
La révolution immatérielle plutôt que l'industrialisation
Peu importe à Lilian Chardon si son invention à lui aussi reste confidentiel. La commercialisation lui importe peu. Seul le symbole compte, celui de la révolution sans axe.
"Toute notre société est basée sur des organisations centralisées", explique-t-il. "Cette roue, elle, tourne sans cet axe. C'est une multitude de petits points qui lui permettent de fonctionner."
Comme il le développe sur son site, l'objectif est avant tout de pousser à "une réflexion plus large sur le cercle, les cycles, la circularité, sur un rapport harmonieux et complice avec la nature, contrairement à la démarche industrielle qui tend à s'affranchir de la nature."
C'est bien pour cette raison qu'il a baptisé son ?uvre "la révolution immatérielle".