Adèle Ponticelli - Publié le 6 juillet 2015
PROSPECTIVE - Bruno Bonnell, as de la robotique, nous expose sa vision de la vie et de la maison en 2050.
Bruno Bonnell est un homme très occupé. Un travailleur passionné de robotique doublé d'un entrepreneur insatiable. Le jour, il préside notamment Awabot, Syrobo, administre Robopolis, organise le salon de la robotique Innorobo. Le soir, de 21h à minuit il travaille en Californie via son "robot de téléportation", comme il aime appeler son robot de téléconférence. Son style de vie est au plus près du futur qu'il anticipe pour nous tous.
"En 2050, il n'y aura plus de séparation entre la vie privée et la vie professionnelle. Entre ces moments à la maison et au travail, ce sera la continuité permanente", prévoit Bruno Bonnell.
Car nos maisons et appartements seront en même temps nos lieux de travail. Selon le seigneur de la robotique française, 30 à 40% de la population travaillera à distance. Certains avec la France, d'autres avec les États-Unis, le Japon, etc. De quoi rester bien plus que 18h39 chez soi !
Le bureau roi
Conséquence immédiate de la généralisation du télétravail, le bureau devient la pièce centrale du foyer. "Ce sera le poste le plus connecté de la maison, là où on va travailler en se téléportant", raconte-t-il.
À titre d'exemple, il cite les pilotes de drones "qui rentrent dans une pièce confortable et prennent le contrôle d'un appareil qui est à des milliers de kilomètres". Il précise que cela pourrait aussi s'adapter au travail à l'usine ou encore à celui du conseiller bancaire. Qu'il s'agisse de production ou de relation client, tout cela pourrait donc se faire depuis le coeur de notre maison.
Le reste de l'habitation justement ? Si on imagine un immeuble, il formera une sorte de "village vertical", avec de nombreux espaces de partage : des grandes cuisines, des salles à manger, des endroits où faire la fête, du sport, assister à des spectacles, des lieux où parler, des salons lounge...
Nos logements seront donc composés d'espaces intimes (chambre, salle de bains...) et d'espaces communs, partagés avec nos voisins. Nous reviendrons à un mode de vie davantage tourné vers la communauté.
R2-D2 plutôt que C-3PO
À l'intérieur de nos cellules domestiques, nous accueillerons une flopée de robots compagnons chargés du nettoyage, des tâches domestiques, et plus encore.
"Ce soir tel film est joué dans la salle vidéo 34. Les Dubois et les Dupont vont y aller, est-ce qu'on vous inscrit ?" cette question sera posée par votre robot-majordome, prédit Bruno Bonnell. Les robots compagnons s'organiseront entre eux pour proposer aux humains des activités en temps réel.
Trop tôt cependant pour que votre robot-majordome ressemble à un humain, comme dans la série Real Humans. "On vivra plutôt avec R2-D2 que C-3PO", résume l'amateur de robots en références aux héros droïdes de la saga Star Wars.
"Quand vous voyez un humanoïde, vous vous attendez à ce qu'il fasse exactement ce que fait un homme, or la technologie en 2050 ne permettra pas de satisfaire cette attente. Quand vous voyez un R2-D2 par contre, tout ce qu'il fait pour vous rendre service, vous trouvez ça super."
Pour être adoptée, la technologie se doit de ne pas décevoir.
"On ne vivra pas non plus dans un monde de supers applications", où la technologie serait en quelque sorte invisible, estime Bruno Bonnell. Les robots auront une existence physique : "on pourra les toucher, les caresser, les taper..." (vous n'êtes pas obligés d'aller si loin !). Ils seront mobiles pour donner une impression de vie.
Les maisons seront adaptées à leurs déplacements. "Il y aura des protocoles pour que les portes de la maison soient connectables aux robots et que ces derniers puissent les ouvrir automatiquement, décrit-il. Les escaliers pourront devenir des rampes, l'ouverture des fenêtres sera pilotable par un système de robots, etc."
En ville, nous vivrons !
La robotique envahira aussi la ville, où se trouvera l'écrasante majorité des habitations. D'après Bruno Bonnell, les voitures individuelles auront disparu au profit de taxis robotisés. Résultat : "30% de l'espace public sera ainsi rendu aux citoyens." En 2050, la maison sera entourée d'arbres et de verdure. Bâti et nature seront intriqués.
Une organisation éloignée des maisons futuristes que l'entrepreneur imaginait, adolescent, lorsqu'il écrivait de la science-fiction. "Je voyais des maisons identiques à celles qui existaient, mais ailleurs : sur l'eau, dans l'espace, etc. Aujourd'hui, j'aime la ville."