Lisa Hör - Publié le 24 avril 2018
MAISON-ÉCOLO - Cette habitation totalement hors réseau dans la Creuse, construite par Avenidor, démontre que des panneaux solaires peuvent suffire à alimenter toute une maison.
C'est une maison coupée de tout, au milieu des bois. Elle n'est branchée ni au réseau d'électricité, ni à celui de l'eau potable, ni à celui des eaux usées, ni même au téléphone ! Mais cela ne l'empêche pas d'être très confortable, bien au contraire, puisqu'il y fait autour de 20° toute l'année, qu'elle dispose de 3 salles de bains et d'internet, en captant la 4G.
C'est ce qu'explique Steven Kaszuba, le concepteur de cette maison hors norme, qui la présente comme la première maison au monde à la fois 100% autonome et labellisée passive premium. Ce label signifie que, non seulement l'habitation est parfaitement isolée et n'a presque pas besoin de chauffage, mais qu'en plus, elle produit sa propre énergie.
“Les maisons totalement hors réseau sont extrêmement rares et souvent elles utilisent un groupe électrogène (alimenté par de l'essence et qui produit donc du dioxyde de carbone, ndlr.)”, indique Steven Kaszuba.
Avec Avenidor, filiale de l'entreprise de BTP de sa famille, il a construit ce prototype pour “montrer aux gens qu'une maison totalement autonome fonctionne”. Et encourager plus de personnes à produire leur propre énergie.
Des panneaux solaires et des batteries pour l'électricité
Cette grande maison de 250 m2 ressemble à une maison alsacienne traditionnelle, avec sa façade peinte en bleu. Un look étonnant puisqu'elle se trouve dans la Creuse, mais c'est le moyen de montrer que l'on peut construire une maison à la pointe de la technologie “sans qu'elle ressemble à un vaisseau spatial”, note Steven Kaszuba.
Pour le moment, personne n'y habite, car des tests sont réalisés sur la ventilation ou encore la qualité de l'air. Mais tout est en place pour largement subvenir aux besoins d'une famille.
60 panneaux solaires sont alignés le long de l'étang qui jouxte la maison et tout a été fait pour maximiser leur production d'électricité. “Il s'agit de panneaux solaires bi-faces, qui captent les rayons du soleil des deux côtés, dessus et dessous. Les rayons sont réfléchis par l'eau de l'étang et par la dalle sous les panneaux”, explique Steven Kaszuba.
Une partie de l'électricité produite est consommée en direct, pour la lumière et les appareils électroménagers, la ventilation (pas le chauffage, pratiquement pas nécessaire même en hiver, puisqu'il s'agit d'une maison passive).
Le reste de la production est stocké dans des batteries domestiques, pour alimenter la maison la nuit notamment, mais aussi les deux autres bâtiments construits à côté, qui servent de centre de recherche sur la construction écologique.
De l'eau potable grâce à une nappe phréatique
L'eau qui sert à prendre une douche, faire la vaisselle, ou même se servir un verre au robinet, provient d'une nappe phréatique juste en dessous. Elle passe par différents filtres pour être rendue potable.
“On pourrait aussi récupérer l'eau de pluie, imagine Steven Kaszuba. Il est interdit de consommer de l'eau de pluie telle quelle, mais si elle est traitée, il n'y a aucune interdiction”, assure Steven Kaszuba, qui a épluché la loi. Il est d'ailleurs tout à fait possible de récupérer l'eau de pluie sans la traiter pour certaines tâches dans la maison et au jardin.
Quant aux eaux usées de la maison, elles ne vont pas dans le tout à l'égout mais sont traitées sur place, avec une micro-station enterrée.
Rendre l'autonomie partielle accessible
Certaines personnes peuvent être intéressées par la construction d'une maison 100% autonome, estime Steven Kaszuba, en évoquant ceux et celles qui ne veulent plus avoir affaire aux fournisseurs d'énergie et d'eau, ou qui possèdent un terrain qu'il serait trop coûteux de raccorder aux réseaux.
Mais dès lors que l'on habite en ville, cela a moins de sens. “Pour 99% des gens, il faut être connecté, ne serait-ce que pour revendre son surplus d'électricité solaire (en reversant cette électricité dans le réseau classique, ndlr.)”, complète-t-il. “Si tout le monde revendait une partie de sa production, on pourrait se passer de plusieurs centrales nucléaires. Pour moi, c'est une solution d'avenir.”
Si cette maison bleue dans la Creuse démontre qu'une autonomie totale est possible, c'est surtout pour inciter les particuliers à se poser la question d'une autonomie partielle, en s'équipant avec des panneaux solaires et des batteries.
Bientôt une maison autonome et 100% biosourcée
Un tel investissement est-il rentable ? Avec tout le système d'autonomie, le prototype Avenidor a coûté 2500 euros par mètre carré, estime Steven Kaszuba, en précisant qu'ils ont fait des choix coûteux dans l'aménagement intérieur, avec par exemple, un bain à remous ou un plan de travail en granit.
“Mais on serait capable de faire une maison passive à 1500 ou 2000 euros du m2”, ajoute le constructeur, sans compter les équipements d'autonomie, qui doivent être pensés sur-mesure.
Le nombre de panneaux solaires et de batteries, par exemple, dépendent de la taille de la maison, de ses besoins en énergie, de l'endroit où elle est située et des habitudes de vie des occupants.
Pour celles et ceux qui veulent aller encore plus loin, Avenidor s'est déjà lancé deux nouveaux défis : construire une maison avec 70% de matériaux biosourcés, puis construire une maison 100% biosourcée, 100% autonome et “duplicable partout, quel que soit l'environnement” !