Matthieu M. - Publié le 8 juillet 2021
BAGUETTE MAGIQUE - Arnaud Crétot a transformé son jardin en boulangerie low tech grâce à 57 miroirs et à l'énergie solaire. Du pain 100% écolo !
Article mis à jour le 5 avril 2023
Il a beau vivre en Normandie, région peu réputée pour son ensoleillement, Arnaud Crétot est parvenu à lancer la première boulangerie à four solaire d'Europe, dans son jardin ! Grâce à sa machine low tech, cet ancien ingénieur devenu boulanger produit entre 110 et 120 kilos de pains en une journée. “On pourrait faire plus en été, jusqu'à 220 kilos sans trop de problème”, nous explique le Normand, un volume qui n'a rien à envier aux fours électriques classiques.
Le four solaire d'Arnaud est installé dans le jardin de sa maison et occupe une superficie de 11 m2, “c'est imposant”, concède-t-il. Son fonctionnement est simple : les miroirs du four permettent de concentrer le rayonnement dans le four et ainsi, cuire le pain qui se trouve à l'intérieur.
Un kilo de pain qui cuit en 45 minutes grâce à des miroirs et au soleil
“J'ai 57 miroirs qui réfléchissent tous la lumière au même endroit”, précise Arnaud Crétot. Petite contrainte technique supplémentaire, il est nécessaire d'ajuster toutes les 10 minutes la direction des miroirs pour suivre le mouvement du soleil. “Dans un four à bois, on ne laisse jamais le four seul, ici c'est la même chose”, ajoute-t-il. Il suffit de 45 minutes au four pour cuire un pain d'un kilo.
Mais alors pourquoi ne pas cuire son pain avec un four électrique comme le font la majorité des boulangers français ? C'est évidemment l'écologie qui a motivé le choix du Normand. “Avec le four solaire, l'intérêt est sur l'impact de la consommation d'énergie pour cuire le pain. Le four n'utilise pas de combustible, n'en rejette pas. Il n'a pas besoin de minerais rares comme le photovoltaïque, c'est uniquement de l'acier et du verre”, détaille l'ancien ingénieur. Aujourd'hui, l'inflation galopante du prix de l'énergie le conforte encore plus dans son choix !
Bien qu'il ait testé pendant une année une production 100% solaire, Arnaud complète parfois sa production avec un four à bois. “Je faisais mon pain seulement les jours où il faisait beau. C'était contraignant car je changeais le jour de production toutes les semaines”, nous indique-t-il. Désormais, le boulanger ne produit du pain que le jeudi. “Tous mes clients sont prévenus la veille par message et ils sont livrés le lendemain”, ajoute-t-il.
Un tour du monde des solutions énergétiques
Comment passe-t-on d'ingénieur à boulanger ? Bien que la reconversion semble radicale, elle est finalement l'aboutissement logique d'un parcours consacré aux énergies renouvelables. En 2009, Arnaud Crétot est étudiant ingénieur mais ne se reconnaît pas dans l'enseignement qu'on lui prodigue. Il raconte : “On avait l'impression qu'on était en train d‘apprendre à utiliser des outils qui allaient nous faire participer au problème plutôt que de les résoudre.” Pour y remédier, le jeune homme fonde l'association Vagabonds de l'énergie et part à la recherche de solutions énergétiques à travers le monde.
Pendant une année, Arnaud traverse une vingtaine de pays à la découverte de solutions durables pour la planète. Et c'est en Inde qu'il découvre la machine qui a contribué à son changement de vie, 10 ans plus tard. Il rencontre l'entreprise Solar Fire, une “entreprise qui développe des concentrateurs solaires pour alimenter des activités artisanales” précise le site d'Arnaud Crétot. Il en devient le directeur technique et participe à fournir des boulangeries solaires au Kenya, Ouganda et Tanzanie. “Comme je m'occupais de la conception des fours solaires, je me devais de savoir les utiliser”, se souvient Arnaud.
C'est ainsi qu'en 2016, l'ingénieur écolo décide de devenir boulanger. Il passe son CAP de boulangerie en candidat libre tout en passant du temps avec les paysans boulangers de sa région. Un apprentissage qu'il veut mettre au service d'un pain pétri à la main, travaillé au levain, “avec des farines anciennes, bio et locales”, indique-t-il.
Son four solaire a été construit par l'entreprise havraise Lytefire à qui l'ingénieur a transmis les différentes directives pour le construire. Grâce à cette machine low tech, Arnaud a pu démarrer son activité grâce à laquelle il vit désormais. Il a d'ailleurs créé en 2018 Neoloco, sa société qui combine son métier de boulangerie mais aussi de torréfacteur. “Je fais tout un tas de produits dont du café de pois chiche bio de Normandie”, nous apprend-il. Un boulanger pas comme les autres !