Matthieu M. - Publié le 6 février 2022
RÉNOVATION ÉCOLOGIQUE - Avant de poser n'importe quel isolant et d'installer la climatisation, prenez quelques minutes pour découvrir la rénovation low tech. Votre maison pourrait bien être encore plus agréable à vivre !
On vous parle depuis un bon moment de low tech sur 18h39. Philippe Bihouix, ingénieur qui a participé à populariser ce concept, nous a expliqué les vertus de ces technologies simples, écologiques et peu énergivores, à l'inverse de la high-tech qui a de lourdes conséquences sur nos ressources et l'environnement. Voici quelques exemples d'objets low tech pour la maison : un réfrigérateur sans électricité, un four solaire, une éolienne à fabriquer soi-même.
Mais saviez-vous que l'on pouvait appliquer cette approche aux bâtiments eux-mêmes, et en particulier à la rénovation.
C'est ce que nous avons appris grâce à la bande dessinée Rénover low tech c'est tout naturel. L'architecte Emmanuelle Patte et l'ingénieure thermicienne Héloïse Pelen ont contribué à cet ouvrage de vulgarisation. Nous les avons interviewées pour en savoir plus.
Rénover le bâtiment plutôt que construire : une démarche low tech
18h39 : On connaît les low tech comme alternatives aux outils technologiques. Mais pour le bâtiment et la rénovation, à quoi est-ce que cela correspond ?
Héloïse Pelen : Le low tech désigne un ensemble de techniques et de savoir-faire simples. En rénovation de bâtiment, le low tech prend l'existant dans son ensemble et mobilise des ressources locales, renouvelables. Il fait également appel à des savoir-faire locaux et transmissibles pour une mise en œuvre, un usage et une maintenance peu coûteux, durables et accessibles à tous.
Concrètement, à quoi ressemble une rénovation low tech ? Qu'est-ce qui la différencie d'une rénovation classique ?
Héloïse Pelen : Ce qui va changer, c'est que l'on va avant tout regarder ce que la maison est capable de produire toute seule. On va regarder comment on se comporte en été comme en hiver. En été par exemple, on peut se permettre d'être dehors quand il fait trop chaud à l'intérieur. Pourquoi ne pas installer son bureau en extérieur ? L'idéal c'est de s'installer un coin à l'ombre et de prévoir des prises.
Côté isolation, on va essayer de trouver des matériaux locaux. Pour un bâtiment ancien, on peut opter pour de la terre crue qui a cette capacité à stocker et déstocker l'humidité. Il faut choisir des isolants qui préservent la performance du bâti. C'est important pour le confort d'été, car cela donne une sensation de fraîcheur, et en hiver, une sensation de confort et de chaleur.
Pourquoi la high-tech n'est-elle pas adaptée aux bâtiments selon vous ?
Héloïse Pelen : Morgane Parisi, qui a fait la bande dessinée, donne un exemple très précis issu de son expérience. Lors de la grande tempête de 1999, ses voisins n'ont pas pu ouvrir leurs volets électriques pendant plusieurs jours car il n'y avait plus d'électricité. Avec un système high-tech quand il n'y a plus d'électricité, on ne peut plus utiliser le bâtiment.
Emmanuelle Patte : Le high-tech dresse un cadre très normatif de la température intérieure (par exemple, avec les thermostats connectés, ndlr.), mais il ne prend pas en compte la capacité d'adaptation des personnes et de leur corps. Quand l'été arrive, au début on a trop chaud, puis on s'adapte. Il y a une forme de plaisir à vivre des ambiances et des sensations différentes. Et puis, c'est assez agréable de pouvoir ouvrir, fermer, allumer, éteindre quand on le souhaite plutôt que la domotique le fasse à notre place sans nous le demander. Le low tech propose une autre philosophie du confort et de l'humain qui s'inscrit dans un cycle naturel, un cycle des saisons. On fait davantage confiance à nos capacités et on se réapproprie notre libre arbitre.
Le bâtiment est l'un des secteurs qui produit le plus de déchets : 40 millions de tonnes de déchets chaque année selon l'ADEME. Comment les low tech peuvent-ils permettre de les réduire ?
Emmanuelle Patte : Au lieu de démolir un bâtiment, on va reconstruire, rénover et cela, c'est moins de déchets. Avec le low tech, on est sur l'idée d'utiliser des ressources du territoire, en faisant appel à du réemploi, des matériaux locaux, ce qui engendre moins de transport notamment. Et l'une des forces du low tech, c'est de pouvoir réparer quand quelque chose ne marche pas : si l'utilisateur comprend comment la technologie marche, il peut la réparer et il jettera moins.
Héloïse Pelen : Dans le low tech, les objets sont réparables et ont donc une obsolescence moindre. À l'inverse, on a certains objets high-tech super beaux, mais quand ils tombent en panne on ne peut pas les réparer.
À qui dois-je m'adresser si je veux faire une rénovation low tech ?
Emmanuelle Patte : Je dirais qu'avant même de s'adresser à des artisans, il est intéressant de s'adresser à des maîtres d'œuvres, des architectes ou des thermiciens car ce sont des généralistes. On peut aussi faire appel à des artisans locaux qui maîtrisent un savoir-faire et des connaissances techniques anciennes.
Héloïse Pelen : Il y a aussi toute une part d'autoconstruction qu'il faut prendre en compte, prenez le temps de bien réfléchir. Il existe aussi l'association Maisons paysannes de France qui a des délégations départementales et qui est très intéressante quand il s'agit de bâtiment ancien.
Pour aller + loin :
- Téléchargez gratuitement la bande dessinée Rénover low tech, c'est tout naturel.
- Découvrez des exemples de rénovation low tech.
- Regardez à quoi ressemble la vie dans une mini-maison low tech.