Lisa Hör - Publié le 13 décembre 2020
SANTÉ - D'après une nouvelle étude, les particules fines issues du chauffage au bois seraient parmi les plus dangereuses pour la santé. Mais il existe des solutions pour limiter cette pollution.
La pollution de l'air causée par le chauffage au bois était déjà connue. Mais une étude européenne récente, coordonnée par l'Institut Paul Scherrer, et publiée en novembre 2020 dans la revue Nature, vient raviver le feu.
D'après les conclusions de cette étude, le problème ne serait pas seulement la quantité de particules fines émises, mais surtout leur potentiel oxydatif. C'est-à-dire "leur capacité à dégrader des antioxydants, ce qui peut endommager les cellules et les tissus de l'organisme", explique l'Institut Paul Scherrer.
Et justement, les particules les plus toxiques, celles avec le plus grand potentiel oxydatif, seraient celles produites par l'usure des freins et des pneus des voitures... et celles produites par le chauffage au bois.
Devez-vous abandonner le chauffage au bois ?
"Nous pouvons tirer deux enseignements importants de cette étude, commente Isabella Annesi-Maesano, directrice de recherche à l'Inserm et spécialiste des questions de pollution de l'air, dans Le Monde. Le premier est que les pouvoirs publics doivent accentuer la lutte contre les émissions du trafic routier au sens large, le second est qu'ils ne doivent plus encourager le développement du chauffage individuel et des centrales collectives au bois."
Alors, faut-il arrêter de se chauffer au bois pour préserver notre santé ? L'enjeu est majeur : c'est la deuxième cause de mortalité évitable, avec 48 000 morts par an en France.
Sans surprise, pour le Syndicat français des chaudiéristes biomasse (SFCB), la réponse est non, il ne faut pas stopper le chauffage au bois suite à cette étude. "Il est vrai que le bois émet des particules polluantes, mais uniquement dans les conditions que nous combattons et que nous voulons supprimer, c'est-à-dire quand la combustion n'est pas bonne", affirme Éric Vial, délégué général du SFCB dans Batiactu.
"Il faut distinguer les appareils 'non-performants', à savoir les cheminées à foyer ouvert et les appareils anciens datant d'avant l'an 2000 ; et les appareils nouvelle génération, très performants, économiques, confortables et à même de préserver la qualité de l'air", complète le SFCB.
Comment s'y retrouver face à ces deux avis contradictoires ? Faut-il changer de moyen de chauffage d'urgence si vous utilisez le bois actuellement ?
Pour y voir plus clair, nous avons sollicité l'Ademe, l'Agence de la transition écologique, un établissement public dont l'une des missions est l'information du public sur les enjeux environnementaux.
"Le chauffage au bois est une combustion, donc il produit forcément des polluants atmosphériques. Mais il a d'autres vertus, estime Emilie Machefaux, Responsable adjointe du service Forêt Alimentation et Bioéconomie. On peut mettre en avant son caractère économique. Il évite d'utiliser des énergies carbonées importées (gaz ou fioul notamment, ndlr.). On favorise ainsi le développement d'une énergie renouvelable ainsi que l'autonomie énergétique du territoire, puisqu'on importe peu de bois et de granulés."
Comme toujours en écologie, il n'y a pas de réponse simple. Toute activité humaine a un impact. Reste à faire le choix le moins pire et à limiter cet impact.
Comment réduire la pollution causée par le chauffage au bois ?
Emilie Machefaux distingue d'abord les centrales collectives au bois, qui alimentent des réseaux de chaleur, par exemple pour un hôpital ou un quartier ; et le chauffage domestique. "Sur les installations collectives, de grande puissance, il y a des systèmes d'abattements des polluants, qui permettent de limiter l'impact sur la qualité de l'air."
Le problème serait plutôt causé par le chauffage domestique au bois. Cela tombe bien, c'est celui sur lequel vous pouvez agir directement.
Que faire à votre échelle ? "Le mieux, ce sont les émissions que l'on ne produit pas, il faut donc d'abord réduire son besoin de chauffage", explique Nadine Dueso, cheffe du service qualité de l'air de l'Ademe. Pour cela : isoler son logement et ne pas le chauffer (une température de 19°C est recommandée dans les pièces à vivre en journée).
Ensuite, choisir un appareil de chauffage performant en cas de remplacement. Oubliez les foyers ouverts. A titre d'exemple, ils étaient responsables de 48 % des émissions de PM10 (les particules fines dont le diamètre est inférieur à 10 micromètres) en Île-de-France en 2017, selon les chiffres transmis par Airparif. D'après cette association, remplacer tous les foyers ouverts d'Île-de-France par du matériel performant serait le scénario le plus efficace pour réduire la pollution de l'air causée par le chauffage au bois dans cette région.
Par quoi remplacer les foyers ouverts ? Vous pouvez installer un insert, c'est le plus simple. Mais vous pouvez aussi opter pour un foyer fermé, ou un poêle à bûches ou à granulés (voici combien coûte chacune de ces options). Dans tous les cas, l'Ademe recommande de choisir un appareil labellisé Flamme verte 7 étoiles, qui émet peu de particules fines.
Faites-vous bien conseiller pour éviter le surdimensionnement : si votre appareil est trop puissant par rapport à vos besoins, vous allez chauffer à allure réduite, ce qui produit plus de particules qu'un bon feu.
Une bonne combustion, peu polluante, dépend aussi de la qualité du bois de chauffage et de son taux d'humidité (inférieur à 20 %).
- Si vous achetez votre combustible, tournez-vous vers les labels NF bois de chauffage ou France Bois Bûches.
- Si vous consommez votre propre bois, laissez-le sécher en extérieur, sous abri, pendant 18 mois, et faites-le rentrer 24 à 48h avant de le brûler pour finir de le sécher près de la cheminée.
Pensez également à ramoner votre cheminée. Enfin, si vous allumez votre feu selon la méthode top down, vous aurez vraiment fait le maximum pour réduire la pollution de l'air !