Lisa Hör - Publié le 2 janvier 2019
MODE DE VIE - Terriblement tendance, les lofts ont de sérieux atouts. Mais sont-ils faits pour vous ? Et saurez-vous surmonter au quotidien les contraintes de ces grands espaces décloisonnés ?
Sur les photos en papier glacé, les lofts ont tout pour faire rêver. Immense hauteur sous plafond, verrières, déco industrielle tellement tendance… “Ce sont aussi des lieux avec une histoire, ajoute François-Régis Briois, auteur du site Notre Loft. Chez nous, c'est une ancienne menuiserie.” La transformation est souvent spectaculaire, comme chez François-Régis : le grand hangar est devenue une maison inondée de lumière, grâce à un mur entièrement vitré.
Les lofts permettent aussi de vivre dans un grand espace en pleine ville. “Ils sont apparus dans les années 1970 aux États-Unis, où il y a eu beaucoup de bâtiments industriels réhabilités par des artistes à moindre coût, explique Franck Brunaud, dirigeant de l'agence immobilière Cap 40 Loft.
Bien qu'il vante le potentiel de ces biens atypiques, l'expert en immobilier le reconnaît : “C'est un marché un peu particulier, qui n'est pas fait pour tout le monde, et qui réserve parfois de mauvaises surprises.”
Alors, avant que vous lâchiez votre logement actuel, passons en revue les obstacles et les inconvénients !
L'ancienne menuiserie dans laquelle a emménagé François-Régis Briois. © NotreLoft
Déconseillé aux personnes atteintes de phobie administrative
Les lofts déjà aménagés sont des bien rares et prisés, même si, hors de Paris, les perles sont moins hors de prix. Si vous partez d'un bâtiment brut, les travaux seront naturellement importants, mais vous pourrez vous en tirer pour bien moins cher.
Cette ancienne grange transformée en loft par exemple a coûté 60 000 euros à l'achat, et sa rénovation 170 000 euros. Bien sûr, elle n'est pas située en centre-ville, contrairement à la plupart des lofts d'origine industrielle.
Autre point à anticiper : l'autorisation ou non de transformer ce bâtiment. “Si le bien ne jouit pas d'une affectation habitation ou mixte, il est nécessaire de faire une démarche en mairie pour son changement d'affectation mais aussi pour sa fiscalité, si toutefois la mairie l'autorise. En effet, la taxation fiscale n'est pas la même pour un bien à usage de bureaux, d'activités ou pour un usage d'habitation", explique Franck Brunaud. Impossible de zapper cette étape, sous peine de ne pas pouvoir revendre le bien pour un usage d'habitation par la suite.
Le loft de François-Régis Briois après rénovation. © Notreloft
Vivre dans un espace entièrement décloisonné ?
Ces considérations matérielles et administratives dépassées, vous voilà devant un plateau complètement ouvert. “C'est un lieu où tout est possible, on part d'une page blanche, et il n'y a pas, par exemple, de mur porteur en plein milieu, qui pourrait gêner vos projets”, apprécie Lydie Pineau, la décoratrice d'intérieur et designer d'espace de l'agence Kiosque Déco. Et c'est bien là toute la difficulté : “Comment créer un lieu chaleureux dans un lieu qui n'était pas prévu comme une habitation ?”
Pour ne pas dénaturer l'espace, les lofts restent habituellement le plus ouvert possible. Cela correspond à une envie largement répandue : “95% des demandes que l'on me fait aujourd'hui, c'est pour décloisonner ou encore créer une une suite parentale”, affirme Clara Ajmar, architecte d'intérieur de l'agence MRC.
Reste à voir si vous ne vous sentez pas mieux dans de petites pièces : “Quand les gens nous parlent de grands espaces et de murs blancs, mais que chez eux, c'est plutôt cocooning, on peut se poser la question”, continue l'architecte. Pour savoir si cela vous conviendrait, vous pouvez consulter notre grand débat, pour ou contre la cuisine ouverte. La plupart des arguments et contre-arguments s'appliquent aussi dans un loft.
Une grande pièce à vivre, c'est pour sa part ce que recherchait François-Régis Briois : “C'est en même temps la salle de jeu pour nos filles, on est tous ensemble dans la même pièce.” Mais qui dit grande pièce partagée, dit aussi un peu de bazar, entre les jouets au milieu du salon et la vaisselle sale que l'on ne peut pas cacher juste en fermant la porte.
François-Régis partage aussi cette réalité sur Instagram, et cela plait beaucoup aux internautes qui le suivent. C'est la preuve qu'un loft peut parfois se plier à la vie familiale, à condition de faire une croix sur les chambres ouvertes, et la baignoire au milieu du salon.
Les filles sont passées par là. © NotreLoft
Mais le manque d'intimité peut décourager. Ça a été le cas pour Tina et son compagnon, locataires d'un loft à Montreuil, ils ont fini par déménager. Il s'agissait d'un loft en rez-de-chaussée (une configuration fréquente pour ce type de bien), surmonté par trois autres appartements semblables. Tous étaient desservis par une grande porte commune.
“Étant donné que nous ne voulions pas mettre de rideaux pour laisser un certain espace à la pièce, et qu'il y avait de grandes baies vitrées, les voisins pouvaient voir tout ce qu'on y faisait depuis la cour, sans compter qu'ils pouvaient également tout entendre”, raconte-t-elle. “Pour les gens pudiques comme mon chéri, ça pose pas mal de problèmes.” Il y a plus agréable que d'être surpris au saut du lit par son voisin qui sort les poubelles !
Lumière, chauffage et autres contraintes techniques
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le manque de lumière peut aussi être un inconvénient. “Si toute la lumière vient d'une baie vitrée en façade, on va perdre en luminosité dans le fond du loft”, note l'architecte d'intérieur Marion Gouëllo. Il faut alors poser un faux plafond pour pouvoir installer des luminaires ou poser astucieusement des prises.
C'était le cas chez Tina et son conjoint : “Nous perdions beaucoup de lumière et quelquefois en passant la porte d'entrée, on s'apercevait qu'il faisait très beau, alors que dans le loft on se sentait un peu comme dans une grotte.”
© Dans ce loft, pas de fenêtre dans la chambre, d'où la verrière ! Shootin pour Marion Gouëllo
Un grand espace très ouvert nécessite davantage de chauffage, sauf s'il est parfaitement isolé. Impossible de miser seulement sur l'électricité, sinon gare à la facture salée. L'option pompe à chaleur est intéressante, mais l'investissement peut monter jusqu'à 11 000 euros.
Tous ces inconvénients peuvent être être surmontés, avec de bonnes idées d'aménagement. Reste encore l'absence de jardin, liée à la localisation de la plupart des lofts, en pleine ville. À moins que… les propriétaires de cette ancienne usine ont bien créé une petite jungle à l'intérieur. Murs végétaux et plantes en pots seront vos alliés !
