Lisa Hör - Publié le 19 août 2017
MAKER - Complètement novice en bricolage, notre journaliste s'est rendue dans un atelier collaboratif, l'Atelier Solidaire à Saint-Ouen, pour découvrir le monde des makers.
Je n'ai jamais utilisé de perceuse de ma vie, ni vraiment bricolé chez moi. Ce sont des choses qui arrivent.
Mais, à force de voir tous les tutoriels publiés sur 18h39 et de rencontrer des makers, ces bricoleurs et bricoleuses qui partagent leurs idées géniales et leur savoir faire, cela m'a donné envie de fabriquer quelque chose de mes propres mains.
Direction un FabLab (un atelier collaboratif où les outils sont mis à disposition de tous) avec un objectif : cette fois, je ne ferai pas que regarder.
L'Atelier Solidaire de Saint-Ouen, au nord de Paris continue d'accueillir le public en plein mois d'août. Rendez-vous pris pour un mardi en fin de journée. Ici, chacun peut venir bricoler autant qu'il le souhaite, moyennant un forfait de 15 euros à l'année.
L'atelier solidaire de Saint Ouen : place à l'imagination !
Leçon n°1, avant même de rentrer dans l'atelier : la règle, ici, c'est d'abord de s'amuser. Pour preuve, le jeu, mi-labyrinthe, mi-flipper, posé sur une table dans la cour.
"J'aimerais bien ajouter un cercle de feu", raconte Michaël, 30 ans, en faisant rouler la balle entre les obstacles de ce jeu qu'il a fabriqué avec des enfants du quartier. À voir une autre de ses créations, le vélo à deux étages posé non loin de là, il en serait bien capable.
Xavier, 45 ans, le fondateur de cet atelier de quartier, arrive à son tour. Il a accepté, au pied levé et avec enthousiasme, de m'apprendre à utiliser la fraiseuse numérique. C'est l'un des outils emblématiques des FabLabs, et il m'intrigue depuis longtemps.
Pilotée par ordinateur, elle peut découper toutes sortes de dessins compliqués. Pour tester son potentiel, j'ai décidé de fabriquer une lampe en bois en forme de cactus : difficile de découper l'arrondi des bras avec une scie manuelle ou même sauteuse.
Découper à la fraiseuse numérique : opération (presque) réussie
Xavier est aux manettes : c'est seulement la deuxième fois qu'il utilise la fraiseuse numérique, qu'il a assemblé récemment avec d'autres membres du FabLab. La machine, un modèle Open Maker Machine Pro, est arrivée en kit.
Nous plaçons la planche à découper sur une grande table, et la fraiseuse elle-même, qui ressemble à une perceuse, se déplace sur trois axes (de gauche à droite, d'avant en arrière et de haut en bas).
Une dizaine d'adhérents, prévenus dans l'après-midi de notre projet, se sont rassemblés autour de nous. Des enfants bricolent des vélos dans la cour mais s'empressent de rentrer quand la machine se met en route. Lentement mais sûrement, la machine exécute le dessin.
Sauf que, la découpe terminée, la fraise "oublie" de remonter sur son bras avant de retourner à son point de départ. Voilà qu'elle scie l'une des branches du cactus ! Xavier se précipite pour appuyer sur le bouton d'arrêt d'urgence, mais trop tard, notre cactus est manchot. La faute à une erreur de programmation au moment de donner les instructions à la fraiseuse numérique... ça arrive.
Il est trop tard pour recommencer ce soir, c'est plutôt l'heure de boire un verre avec les quelques personnes qui sont encore là. Il fait bon, Belek nous raconte son projet de food truck inspiré des charrettes à bras de son Kirghizistan natal.
Leçon n°2 : se rendre dans un FabLab, c'est l'assurance de rencontrer des gens de tous horizons.
On passe aux choses sérieuses
Une semaine plus tard, retour au FabLab. Fierté : c'est moi qui pilote la fraiseuse numérique. Avec l'aide de Xavier, quand même. Le logiciel n'est pas compliqué en soi, mais il faut un peu de pratique pour le maîtriser.
Surtout que la machine, pour une raison inconnue, n'apprécie pas tellement qu'on veuille augmenter la taille du cactus. On reprend toutes les étapes depuis le début... Satisfaction quand on trouve la solution et que la machine s'exécute enfin sans fausse note.
Leçon n°3 : La patience est la première des vertus du bricoleur numérique.
Encore une fois, le temps passe vite, la soirée est bien avancée. "Aucun souci, nous on est contents si on peut passer toutes nos soirées à bricoler", me rassure Xavier.
Fer à souder et pomme de terre
Pour terminer la lampe, il ne reste plus qu'à coller plusieurs bandes Led à l'arrière de la planche de bois découpée, et surtout à les relier entre elles à l'aide d'un fer à souder et de fils électriques, pour que le courant passe.
Cela demande de la minutie : les fils électriques ne doivent pas se toucher, sinon, c'est le court-circuit. Je me brûle deux ou trois fois au passage (aïe), mais finalement, je ne m'en sors pas si mal. Et c'est un rappel sympathique des cours de technologie du collège.
Pendant que je m'applique, Xavier s'attaque à un autre projet. Avec la fraiseuse numérique, Il creuse... une pomme de terre ! Il veut en faire un tampon, pour un prochain atelier de teinture végétale.
"Tu as juste fait un trou dedans", s'amuse Michaël, qui, de son côté, termine un porte-vélo avec quelques chutes de bois. C'est vrai qu'on pourrait obtenir le même résultat avec un couteau. Mais tester les potentialités de la fraiseuse est bien plus intéressant !
C'est le moment de brancher la lampe... Victoire, elle s'allume. Pour finir vite, Xavier se charge de lui façonner un pied en quelques coups de scie et tours de perceuse.
Michaël voudrait bien ajouter un élément pour mieux fixer le fil de la lampe et solidifier le tout.
Leçon n°4 : Quand on commence à bricoler, c'est difficile de s'arrêter.
Je file pour tenter d'attraper le dernier métro. Avec l'idée qu'il y a encore plein de machines à tester dans cet atelier et la ferme intention de revenir.