Stella Orsini - Publié le 23 novembre 2019
TRI - De quoi les associations ont-elles vraiment l'utilité ? Reçoivent-elles trop de textile et pas assez d'électroménager ? On vous explique comment "bien donner".
Après avoir vidé vos placards, des kilos d'objets vous restent entre les mains ? Avant de vous précipiter pour donner vos anciens trésors, il est bon de se poser quelques questions car en matière de don, les clichés ont la dent dure. Tour d'horizon des bonnes pratiques avec Philippine Garde, chargée de mission chez Emmaüs Défi.
Quel est le premier réflexe à avoir lorsque l'on souhaite donner un objet ?
Philippine Garde : la première chose, c'est de bien faire la différence entre ce qui est en bon ou en mauvais état. Car c'est cela qui va déterminer ce qui va relever du réemploi ou du recyclage. Les filières de recyclage se trouvent plutôt du côté des déchetteries et éventuellement des conteneurs que l'on peut trouver dans la rue, alors ce qui est en bon état va être redirigé vers des associations. Ensuite, on peut essayer de se diriger vers des lieux spécialisés sur un type d'objet. C'est le cas notamment du chantier d'insertion Rejoué qui collecte les jouets.
De quoi souffrent les associations aujourd'hui ?
Notre modèle : "réemployer des objets et par ce biais créer des emplois en insertion" est mis en danger par le phénomène de revente de particulier à particulier. Le réflexe des personnes aujourd'hui, c'est de d'abord trier les objets en fonction de leur valeur pour les revendre sur des sites puis de donner ce qui reste, ce qui est cassé ou qui ne vaut plus rien. Or la plupart des gens viennent chez Emmaüs pour trouver des petits trésors pas chers. Paradoxalement, ils cherchent des objets de qualité, alors qu'eux-mêmes les revendent ailleurs.
Donner des objets, des meubles ou du textile à des associations ce n'est pas juste se débarrasser, c'est faire un don. C'est un vrai choix, pas un choix par défaut parce que l'on n'ose pas jeter quelque chose.
La qualité des dons se dégrade-t-elle ?
Oui, pour le textile, par exemple, nous n'avons pas de problème de quantité parce que les personnes achètent des vêtements en flux continu, mais de qualité, qui, elle, se dégrade au fil des années. Les habits vendus 10 euros par des géants de la fast fashion sont aujourd'hui confectionnés pour ne durer qu'une saison. Dans ces conditions, il nous est compliqué de valoriser ce que l'on reçoit. Pour les dons de textile, on ne valorise que 20 % des dons, pas plus. Nos nouveaux modes de consommation rendent le réemploi de plus en plus difficile.
Il y a aussi le fait que lorsqu'il s'agit d'électronique ou d'électroménager, les personnes stockent longtemps leurs appareils avant de les donner. Or, l'innovation fait qu'au bout de quelques années, ils n'ont plus beaucoup de valeur. Un vieil ordi ou un ancien modèle de téléphone perd toute sa valeur le temps que l'on se décide à le donner.
Y a-t-il des objets que l'on n'ose pas donner et qui sont pourtant utiles ?
Les donateurs donnent facilement leurs vêtements mais oublient la plupart du temps qu'ils peuvent offrir d'autres objets comme une pochette d'ordinateur, une bassine... Ce sont des objets très recherchés par les associations. Il faut se dire que n'importe quel objet qui traîne dans une maison peut être donné, et vendu !