Lisa Hör - Publié le 11 décembre 2021
DÉCO & PSYCHO - Ringard le feng shui ? Pas avec le livre de Caroline Watelet et Billie Blanket, qui donne les clés pour apporter harmonie et équilibre, tout en soignant sa déco.
“Ah ! Tu as changé de décor Caroline”, s'amuse Laetitia, alias Billie. “Oui, on a du monde à la maison, je me suis réfugiée dans cette chambre.” A peine l'interview en visio commencée, on a beau être chacune derrière son écran d'ordinateur, on sent tout de suite la complicité qui les relie. Elles ont toutes les deux une voix chaleureuse et c'est un peu comme si elles nous recevaient chez elles, pour une conversation entre amies.
Billie Blanket est journaliste déco et a lancé son blog, hébergé par Elle Déco, il y a plusieurs années. Sur Instagram, elle anime également une belle communauté autour de son univers. Caroline Watelet est designer d'intérieur et spécialiste du feng shui et en géobiologie.
Ensemble, elles viennent de publier Toit et Moi, du décor de la maison au bien-être intérieur (éditions du Chêne, novembre 2021). Elles y proposent “une analyse pièce par pièce d'un point de vue psychologique et énergétique”, des conseils pratiques, mais aussi des entretiens avec des psychologues ou philosophes sur la maison.
Sur 18h39, on vous a parlé du feng shui à plusieurs reprises, comme outil d'aménagement mais aussi de développement personnel. Et il faut l'avouer, on est tiraillés entre notre intérêt pour tout ce qui permet d'être mieux chez soi, et notre côté cartésien, qui menace de reprendre le dessus dès qu'on lui parle d'énergies.
Alors, forcément, on a voulu en savoir plus : que nous proposent les deux autrices pour remettre le feng shui au goût du jour ?
La clé : observer sa maison et se poser les bonnes questions
18h39 : Caroline, vous êtes décoratrice holistique, qu'est-ce que ça veut dire ?
Caroline Watelet : C'est pour exprimer le fait que l'on considère la maison en globalité, avec les gens qui vont vivre dans ce lieu, et toucher par la décoration leur état émotionnel, leur santé physique et psychique.
18h39 : Billie, comment vous est venue cette sensibilité pour la décoration ?
Billie Blanket : Elle est là depuis toujours, j'ai grandi dans une famille de décorateurs et d'artistes. Je ne voulais surtout pas faire comme eux et finalement j'ai été rattrapée par la déco, c'était tout ce que j'aimais sans le savoir.
18h39 : Comment en êtes-vous arrivées à écrire ce livre ensemble ?
B.B : Avec Caroline, on s'est rencontrées par l'intermédiaire d'un ami attaché de presse. Je sentais qu'il y avait plein d'autres choses à découvrir autour de la déco, plus orientales, un peu perchées. On a eu un coup de foudre l'une pour l'autre, j'étais passionnée par tout ce qu'elle racontait. On s'est dit que l'on pouvait rendre accessible ce qu'on appelle le feng shui qui a parfois un côté un peu ringard et niche.
C.W. : Quand j'ai commencé mon activité, je voulais montrer que l'on peut faire de la déco feng shui sans que ce ne soit cheap, et que ça peut s'atteler à une déco très chic ou bobo ou en tout cas, jolie. Et toutes les deux, on avait le même amour des maisons et la même conviction qu'il nous faut un petit toit que l'on soigne, même s'il ne fait que 30 m2, car c'est une extension de notre corps.
18h39 : Pourquoi est-ce si important de soigner son intérieur ?
C.W. : Ce que l'on a voulu donner comme clé, c'est qu'en observant sa maison, c'est soi-même que l'on observe. C'est l'opportunité de faire un travail sur soi car la maison exprime tout notre inconscient. Est-ce qu'on s'autorise à avoir du confort ? Est-ce que l'on dort bien ? Est-ce qu'on est content de retrouver notre maison ? Modifier son décor c'est aussi reprendre son pouvoir sur sa vie et l'aligner sur ce que l'on veut vivre. Par exemple, souvent les personnes qui se plaignent de trop travailler, vont avoir chez elles des chaises rigides, ne vont pas avoir de tapis. En leur faisant prendre conscience de cela, elles vont s'autoriser plus de détente. C'est comme l'acupuncture de la maison, pour débloquer les flux énergétiques et la faire respirer.
B.B. : La maison dit beaucoup de nous, mais si on la décore en conscience, elle nous le rend, elle peut nous faire beaucoup de bien.
C.W. : Elle va alors nous soutenir et non pas nous fatiguer.
18h39 : Qu'est-ce qu'un intérieur harmonieux pour vous ?
C.W. : Déjà, avoir une entrée qui vous accueille. C'est la pièce qui fait l'interface entre le monde extérieur et l'intérieur, on l'appelle la bouche du chi. C'est le premier endroit par lequel va entrer l'énergie, qui va diffuser l'ensemble de la maison.
C'est aussi utiliser les énergies yin et yang, le principe masculin et le principe féminin, l'énergie solaire et l'intériorité. Il faut toujours veiller à ce que ces énergies soient équilibrées. Les matières dures, métalliques, brillantes, c'est le yang, qui exprime une énergie solaire. Et le yin, c'est le velours, les tapis, le moelleux, tout ce qui va apporter un ralentissement. Par exemple, si dans une chambre vous n'avez ni rideaux ni coussins, et qu'elle est peinte en rouge, ça ne va pas favoriser votre sommeil.
Bouger les meubles pour faire circuler l'énergie
18h39 : Billie, vous avez été tout de suite convaincue par le feng shui ?
B.B : J'ai été confortée dans mon idée qu'une maison a une âme et une mémoire, il s'y passe des choses, ce n'est pas qu'un bloc de béton dans lequel on a mis des objets et des meubles. Ça m'a apporté des réponses et des explications. Je suis beaucoup plus attentive à tout ça maintenant quand je vais faire mes shootings à droite à gauche, je remarque “ah zut ! le bureau n'est pas au bon endroit”... Avant je ressentais des choses, mais maintenant, j'arrive à les exprimer.
C.W. : Il y a l'exemple de ton salon.
B.B : Oui ! Je l'ai expérimenté personnellement, notamment grâce à Caroline. Je voyais bien qu'il y avait un truc qui ne tournait pas rond dans mon salon, que les gens avaient tendance à ne pas trop s'installer. Il n'y a pas d'entrée chez moi, on rentre directement dans une grande pièce salon - salle à manger. J'étais persuadée qu'il fallait séparer les deux, alors j'avais mis le canapé en plein milieu. Mais en fait, je bloquais l'énergie et l'accueil, ça empêchait d'être nombreux et de mettre des fauteuils. Caroline m'a proposé de le changer de place, on a mis le canapé contre un mur. Maintenant, quand je fais un dîner, les invités s'installent et l'énergie circule. D'ailleurs, quand mon fils a vu le changement pour la première fois, il a tourné autour de la table basse et m'a dit “regarde, c'est drôle, on peut circuler maintenant”.
C.W. : Chez une famille dans laquelle je suis intervenue au contraire, tous les canapés et fauteuils étaient complètement éclatés. On a tout regroupé et les rapports ont changé, le soir ils se retrouvent, ont envie de faire un jeu de société… Beaucoup de gens vivent dans un décor par habitude alors qu'il y a un blocage et un mal-être.
B.B. : Ça me fait penser, depuis que je suis toute petite, j'ai toujours aimé changer ma chambre de sens.
C.W. : Moi aussi quand je suis stressée, j'ai besoin de changer les meubles de sens, ça fait comme un reset, ça reprogramme l'ordinateur et ça fait re-circuler l'énergie.
18h39 : Difficile de savoir par où commencer quand on est habitué à sa déco ou à son désordre. Comment regarder sa maison autrement pour amorcer un changement ?
C.W. : On peut regarder ses tableaux, les murs parlent : est-ce qu'ils renvoient une image positive ou négative ? Par exemple, l'image d'une femme recroquevillée renvoie peut-être à votre grande peur de la solitude. Observez aussi votre corps, comment il progresse dans la maison. Est-ce que vous vous cognez, est-ce que vous vous faites mal au dos quand vous attrapez un livre ? Et au fur et à mesure, vous allez améliorer les choses. Est-ce que vous gardez les objets par habitude ou parce que vous les aimez ?
B.B. : Ceux qui ont en ont besoin peuvent aussi se faire aider, c'est le rôle de Caroline. C'est aussi pour ça que l'on a écrit ce livre pièce par pièce, comme un guide pratique.
18h39 : Comment vos lecteurs et vos clients perçoivent-ils le feng shui, est-ce qu'ils sont surpris, réticents, intéressés ?
C.W. : Il y en a pas mal qui s'y intéressent depuis longtemps. Avec le livre, on a touché un public pas du tout renseigné sur tout ça, mais il y a une vraie urgence pour les gens à se sentir bien chez eux, avec le contexte un peu anxiogène.
B.B. : Je n'avais jamais trop parlé de ça, je me disais “est-ce qu'ils vont me prendre une folle ?” ! Et en fait pas du tout, on se rend compte qu'il y a un vrai intérêt, ça les amuse beaucoup et en plus, on a voulu le rendre très accessible, ça ne fait plus peur.
C.W. : Moi je suis cintrée et je l'assume ! Plus sérieusement, la base c'est de regarder sa maison et de se demander si on est bien dedans.
B.B. : Si ma mère a réussi à ouvrir le bouquin du haut de ses 75 ans, elle qui a bossé dans la déco toute sa vie, c'est qu'on a réussi !