Lisa Hör - Publié le 29 décembre 2020
ECOLOGIE - Pour Gautier, se lancer dans le zéro déchet en famille était loin d'être évident. Mais un livre, et sa compagne, l'ont convaincu de tenter l'expérience.
Quand sa femme lui a fait lire, il y a un peu plus de 4 ans, Zéro Déchet (éditions J'ai lu, 2015) de Béa Johnson, premier gros succès de librairie sur le sujet, Gautier n'a pas vraiment été emballé. "Avec le boulot et les enfants, ça me paraissait un peu difficile", concède-t-il.
Mais Gladys n'a pas abandonné. Et c'est un autre livre qui l'a fait changer d'avis un peu plus tard : Famille (presque) zéro déchet - ze guide (éditions Thierry Soucard, 2016), de Bénédicte Moret et Jérémie Pichon.
Béa Johnson a beau avoir elle aussi embarqué sa famille, sa maison californienne étincelante, ses tenues impeccables malgré un dressing plus que minimaliste et sa démarche radicale peuvent intimider. Au début, elle est tout de même allée jusqu'à ramasser des feuilles dans la forêt pour se passer de papier toilette. Avec ses illustrations humoristiques, le guide de la famille presque zéro déchet peut sembler plus accessible. "Le livre donnait des petites actions qu'on pouvait faire tout de suite, ça a été mon déclencheur", raconte en tout cas Gautier.
Tous les freins n'étaient pas levés pour autant, mais le couple s'est attelé à la tâche, geste après geste. Et ce sont eux, maintenant qui peuvent servir de modèle, puisqu'ils ne jettent plus que 5 kg de déchets par an.
"Tout va bien, ça va le faire"
Un résultat impressionnant, qui n'est pas venu à coups de grands sacrifices. Pas de couches lavables par exemple, ils ont préféré attendre quelques mois que le petit dernier devienne propre.
La philosophie de la famille, c'est plutôt un petit pas à la fois. À commencer par l'installation d'un nouvel accessoire indispensable dans leur jardin. "Je suis allé à une initiation sur le compostage, ça me paraissait compliqué, se souvient Gautier. Mais je suis ressorti avec un composteur, en disant tout va bien, ça va le faire. Et à l'usage, c'est vrai que ça n'est pas difficile, ça ne pue pas, c'est quasiment pas de travail."
Surtout, cela permet de faire tout de suite une grande différence. Les déchets alimentaires représentent en effet 1 / 3 de la poubelle des Français-es en moyenne selon l'Ademe (l'Agence de la Transition Ecologique).
Gladys et Gautier n'ont pas pour autant aménagé un jardin hyper productif grâce à leur compost : ils cultivent tout juste 5 m², pour le plaisir de manger quelques légumes à eux, sans idée de rendement.
Comment, alors, sont-ils parvenus à un tel changement ? "Pas mal de bouquins disent de commencer par une pièce entière. Nous, on a plutôt saisi des opportunités là où elles se présentaient. Par exemple, on s'est dit, tiens, il reste un bidon de lessive. On va faire notre lessive nous-même et si ça ne nous convient, il restera de quoi laver le linge quand même", explique Gladys.
Justement, la recette de lessive proposée par la famille presque zéro déchet ne l'a pas convaincue. Plutôt que d'abandonner, Gladys a fait un compromis : acheter de la lessive en vrac pendant quelques mois, le temps de se remotiver à tester d'autres recettes.
Le plus compliqué au quotidien a été de repenser les courses : "Il n'y avait pas autant d'offres de vente en vrac, il fallait oser passer le pas de demander aux commerçants d'utiliser nos propres contenants", raconte Gladys, qui va beaucoup moins au supermarché et privilégie les petits commerçants locaux.
"Avant, je faisais pas mal de route pour les courses, maintenant je vais tous les mois et demi dans une épicerie zéro déchet. Heureusement, il y en a une autre qui va ouvrir bientôt pas loin de chez nous."
Tous les deux l'assurent, une fois les habitudes prises, avec une liste et des menus pour la semaine, les courses vont beaucoup plus vite et ne coûtent pas plus cher qu'avant.
Impossible d'être 100 % zéro déchet
Et les enfants dans tout ça ? Raphaël, 6 ans, est "très exigeant, il n'accepterait jamais un yaourt du commerce, il veut ses yaourts faits maisons". Quant à Gabrielle, 8 ans, elle participe activement à faire progresser la famille. En février dernier, comme le raconte sa mère sur son blog La Glad' Life, elle s'est exclamée au petit-déjeuner qu'elle voulait "éliminer un déchet".
Elle était bien embêtée par la boîte en plastique jaune du chocolat en poudre, dont elle raffole. "On lui a dit que ce n'était pas grave, qu'elle avait le droit de ne pas aimer les alternatives qu'on lui proposait", raconte Gladys. Finalement, après quelques temps, Gabrielle a trouvé un substitut avec des palets de chocolat en vrac à faire fondre dans du lait avec un peu de sucre. Tout aussi délicieux !
Le leitmotiv de la famille : trouver des solutions qui leur conviennent à tous les quatre, sans culpabiliser ni viser la perfection. De toutes façons, le zéro déchet en soi est impossible, constate Gladys. "Le terme en lui-même met un peu la pression. Faire un gâteau soi-même en ayant acheté tous les ingrédients en vrac, c'est possible. Mais ces ingrédients ont un passif, ils ont bien été transportés. C'est pourquoi je préfère le terme de réduction des déchets."
Pour relancer leur motivation (et aussi sur l'insistance de leurs voisins, qui voulaient le faire avec eux), ils se sont inscrit au défi zéro déchet organisé par leur communauté de commune près de Lille. Défi à l'occasion duquel nous suivons d'ailleurs la progression d'une autre famille participante, qui débute.
L'idée n'est pas de faire du prosélytisme, mais de convaincre par l'exemple. La preuve que ça fonctionne ? "Au début, mon beau-père m'a dit, je n'ai pas besoin de me lancer dans le zéro déchet, car il y a des gens comme toi qui le font, se souvient Gladys. Finalement, il y a deux ans, il a pris un composteur. Et aujourd'hui, il fait des courses en vrac !"