Lisa Hör - Publié le 1 mai 2019
LOW-TECH - Mutula Kassy, fermier en chef d'un lycée près du lac Victoria, a fabriqué un potager vertical avec des bouteilles et des pailles. Une solution qu'il encourage à reproduire partout dans le monde.
"Quand les employés de l'école m'ont vu revenir avec des poubelles, ils ont cru que j'étais fou", se rappelle Mutula Kassy, 30 ans. Il faut dire que son projet avait de quoi surprendre : faire pousser des légumes dans des bouteilles en plastique.
"Maintenant, tout le monde veut voir mon jardin !", reprend le spécialiste en agriculture durable, à l'autre bout du fil. "Plus de vingt écoles différentes sont venues pour découvrir cette technologie verte."
Ses jardins suspendus sur les murs du lycée de Ng'iya, aux abords du lac Victoria, inspirent jusqu'à Nairobi, la capitale du Kenya, à 400 km de là. Mais c'est aussi un modèle qui peut être répliqué partout dans le monde, y compris sur les balcons des citadins français.
Réutiliser des bouteilles en plastique et économiser l'eau
La mission de Mutula Kassy, comme fermier en chef de l'établissement scolaire, est loin d'être évidente. Il s'occupe de plusieurs vaches laitières, de ruches, d'un poulailler et cultive du maïs et des choux en permaculture, une technique de culture sans apports chimiques, au plus proche des cycles naturels.
Mais la terre, très rocailleuse, n'est pas bonne, et l'eau manque. Alors, quand, début 2018, l'association israélienne Technology Of Peace (Technologie de Paix, en Français) en visite dans le pays, lui propose une formation pour cultiver hors sol, il saute sur l'occasion.
Il apprend en trois jours à fabriquer des "murs verts" : chaque bouteille en plastique est découpée pour accueillir un légume, par exemple un pied de chou kale. Les bouteilles sont accrochées les unes au-dessus des autres et l'eau circule à travers les bouchons percés, grâce à des pailles en plastique. "Pour 3 plantes, je n'ai besoin que de 500 mL d'eau par jour, j'économise 2,5 L par rapport à une culture classique", explique-t-il.
Une technique toute simple, accessible à tous, mais très efficace. Elle nécessite peu de matériaux et permet même de recycler du plastique. Autant de points forts qui l'inscrivent parfaitement dans la démarche low-tech, invitant à repenser l'innovation pour un futur plus soutenable.
Multiplier les potagers verticaux
"Technology of Peace est à la fois un label et un mouvement, dont le but principal est l'émancipation économique grâce à des projets durables et ambitieux, fondés sur des idées simples et facilement reproductibles", détaille Irène Toporkoff, thérapeute et membre de l'association, de retour du Kenya.
Et ça marche : en plus d'alimenter la cantine du lycée, ce jardin vertical est un formidable outil pédagogique pour les élèves, qui participent à l'entretenir. Certains en fabriquent un chez eux, et apprennent à leurs voisins à le reproduire. Un partage de connaissances qu'encourage Mutula Kassy. "Ce projet appartient à la communauté", affirme-t-il.
"Souvent, l'énergie et l'alignement de certaines personnes font des miracles, poursuit Irène Toporkoff avec enthousiasme. La réussite du projet tient à l'adéquation entre le charisme d'une directrice d'école, l'empowerment (donner les moyens aux personnes d'être autonome, ndlr) que permet Technology of Peace, mais aussi le parcours de vie de Mutula Kassy et sa motivation à changer le monde."
Car ce dernier a d'abord été déscolarisé après le collège, faute d'argent. Il décide alors de travailler dans des fermes, et parvient à mettre suffisamment de côté pour passer son baccalauréat. Plus tard, c'est une ONG pour laquelle il a été bénévole qui finance ses études dans une école d'agriculture dans le sud du pays.
Aujourd'hui, il entend sensibiliser toujours plus de monde à l'agriculture biologique et durable. Si, comme il le souhaite, l'envie vous prend de suivre son exemple, suivez notre pas à pas pour fabriquer un potager vertical en hydroponie, à accrocher à votre fenêtre !